Réécouter la Passion

 

Dimanche 10 avril 2022

 

Lc 22, 14 – 23, 56

 

Que venons-nous d’entendre ? Quelle est donc l’histoire qu’on vient de nous raconter ?

Serait-ce l’histoire, belle et tragique, de l’échec ? De l’échec d’un prédicateur galiléen, intègre mais peu diplomate, qui finit trahi par ses proches ? Certes, il y a de l’échec dans cette histoire, de la trahison, mais c’est autre chose, pourtant.

Ou bien, serait-ce l’histoire d’un héros, qui se soumettrait à la volonté aveugle et perverse d’un dieu qui s’amuserait de voir l’humanité souffrir ? Certes, c’est une histoire avec de la souffrance, et une communion inattendue à la volonté de Dieu, mais c’est autre chose, pourtant.

Ou bien, serait-ce une histoire écrite d’avance, un rôle déjà tout défini par de vieilles écritures, un drame cosmique qui écrase l’humanité ? Certes, les Ecritures s’accomplissent, au milieu de la nuit comme du jour, mais c’est autre chose, pourtant.

Cette histoire si longue à écouter, dont nous sortons un peu abasourdis, nous l’avons traversée nos rameaux à la main. Et ce sont ces rameaux qui en disent le véritable sens. Ces rameaux verts, couleur du printemps, de la vie qui revient, après le dépouillement de l’automne, après le froid mortel de l’hiver.

Ces rameaux nous murmurent que cette histoire est l’histoire d’un homme réellement juste ;

Un homme qui, au lieu de s’enfuir devant l’épreuve, n’a pas caché sa face ;

Un homme, dont on voulait arracher la vie, et qui ne l’a pas retenue jalousement ;

Un homme soumis à la moquerie, à l’humiliation, à la mort infâme des condamnés politiques, mais qui n’a jamais retourné contre ses bourreaux la violence qu’on lui imposait.

Cet homme, trahi au milieu de la nuit, crucifié au milieu du jour, le voici mort, vraiment mort. Mais son histoire est celle d’un homme qui n’a eu aucune de nos complicités avec la mort.

Et ces rameaux verts, dans nos mains – ces rameaux couleur de printemps, après l’automne et après l’hiver – semblent vouloir nous dire quelque chose : l’histoire n’est pas encore achevée, patience !

 

 Erwan Chauty sj