Une Fête et une Offrande
Dimanche 6 juin 2021
(Ex 24, 3-8 ; Ps 115 (116b), 12-13, 15-16ac, 17-18 ; He 9, 11-15 ; Mc 14, 12-16.22-26)
Nous fêtons aujourd’hui le sacrement de l’eucharistie. En deux mots, cette fête, c’est la fête d’un repas et la fête d’une offrande. Mais pas n’importe quelle offrande, pas n’importe quel repas.
- Un repas de fête, nous connaissons. Dans un repas de fête, il y a de bonnes nourritures, il y a de la joie, il y a des rencontres sympathiques et heureuses.
Avec le repas du Seigneur, c’est cela et à la fois bien différent.
Ici, c’est le Seigneur qui rassemble, qui converse avec nous, qui présente le pain et le vin, qui partage, qui donne. Ici, plus que la multitude des victuailles et des boissons, ce qui frappe, c’est la générosité, le don, la surabondance de la grâce. Le plus étonnant, c’est que le pain et le vin, c’est le Seigneur lui-même. C’est lui qui se donne en nourriture. « Prenez, ceci est mon corps… Ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, versé pour la multitude. »
Toute nourriture restaure et redonne de la force. Ici, c’est plus encore, car le pain de vie transforme ce que nous sommes. Recevoir le Christ en nourriture, c’est pouvoir devenir un peu de ce qu’il est, afin d’aimer à sa manière. Recevoir le Christ en nourriture, c’est communier à Dieu, en Dieu, avec Dieu.
C’est un repas qui creuse en nous le désir d’aimer et qui nous donne les forces pour aimer. C’est le sacrement de l’amour. Par le Christ, avec lui et en lui, il s’agit d’être uni au Père dans l’Esprit. Par le Christ, avec lui et en lui, il s’agit de mieux aimer nos frères et nos sœurs dans la famille humaine.
- Cette fête, c’est aussi la fête d’une offrande.
L’eucharistie, c’est non seulement le repas du Seigneur, mais non moins le moment de l’offrande. C’est l’action sacrée et le sacrifice où nous rendons un culte au Dieu vivant.
Il y a des époques et des cultures où il est évident qu’il faut rendre un culte à Dieu… des lieux et des temps où l’offrande sacrée et le sacrifice vont de soi. C’est sans doute moins évident à notre époque et dans la sensibilité commune, y compris la nôtre. Mais la liturgie nous invite bien, les uns et les autres, à vivre ce « sacrifice de toute l’Église ».
Mais encore une fois, c’est le Seigneur qui agit. L’offrande, c’est d’abord celle du Christ qui nous prend avec lui pour aller vers le Père. Et c’est l’offrande du Père qui nous donne son Fils et qui envoie son Esprit.
Cette offrande de l’eucharistie accomplit ainsi tous les sacrifices anciens et les dépasse. Ce qui pouvait être ambigu est purifié, ce qui tendait vers le vrai trouve son achèvement.
« Le Christ… s’est offert lui-même à Dieu… pour que nous puissions rendre un culte au Dieu vivant. » nous dit la lettre aux Hébreux.
Le Christ, dans son mystère pascal, agit aujourd’hui, il se rend présent à nous, il nous donne la vie. Le Christ, dans son offrande pascale, nous prend avec lui. Son offrande devient notre offrande. Dans quelques instants, avec la prière eucharistique, nous nous adresserons à Dieu et nous lui dirons : « nous présentons cette offrande vivante et sainte pour te rendre grâce ». Cette offrande, c’est le Christ, et le Christ qui veut nous prendre avec lui. « Il est grand le mystère de la foi ».
- Un dernier mot sur l’Eucharistie. Elle unit l’extraordinaire et l’ordinaire. Et c’est pour notre joie.
L’extraordinaire, c’est la venue de Dieu. Le ciel et la terre devraient en être ébranlés, tout l’univers, toute la création devrait tomber à genoux. Le Dieu très saint appelle notre adoration. Déjà, avec les anges et les saints, nous sommes invités à chanter et proclamer : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur, Dieu de l’univers ! ».
Et, en même temps, celui que ni le ciel ni la terre ne peuvent contenir, se fait humble nourriture, sous la forme d’un peu de pain et de vin offerts et partagés. Le Très-Haut vient vers nous, et il vient dans l’ordinaire de nos vies.
Nous le savons bien, nous sommes présents comme nous pouvons, avec nos faiblesses, nos distractions, avec notre cœur plus ou moins ouvert. Et voici que le Seigneur est là, au milieu de nous. L’extraordinaire de Dieu consent à l’ordinaire des hommes. Déjà, la force de vie du mystère pascal vient en nos corps mortels, déjà la joie du banquet éternel se laisse pressentir en nos eucharisties, déjà le ciel vient à la rencontre de notre pauvre terre et y annonce la joie éternelle.
Oui, frères et sœurs, ce que nous fêtons aujourd’hui, c’est un repas et une offrande, et c’est l’extraordinaire de Dieu qui vient rencontrer l’ordinaire de nos existences.
Heureux les invités au repas du Seigneur, heureux les invités aux noces de l’Agneau.
J.B. Durand