Sainte Marie, Mère de Dieu

Dimanche 1er janvier 2023

Aujourd’hui je ne commenterai pas l’évangile mais je poserai Seulement deux questions :

1-      Pourquoi appeler Marie « Mère de Dieu » alors que ce titre n’appartient pas aux Ecritures ?

2-      Pourquoi en ce premier jour de l’année, mettre Marie au centre?

Effectivement, dans les évangiles, Marie n’est pas appelée « mère de Dieu ». Tout d’abord, elle est appelée « mère de Jésus ». Comme toutes les mamans, Marie a porté pendant 9 mois son enfant et lorsque le temps fut venu, elle l’a mis au monde. Mais pour Marie, c’est plus qu’une maternité physique, plus qu’une maternité relationnelle très intime, comme il peut y avoir pour toutes les mamans entre elles et leur enfant. Pour Marie, sa maternité est une question de foi. Avant de concevoir charnellement Jésus, elle l’a accueillie et conçue dans sa foi. C’est pourquoi, sa parente Elisabeth s’écrie : « Bienheureuse celle qui a cru ! Et aussi : « Comment se fait-il que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ! »

Allons plus loin grâce au récit de l’annonciation. Marie n’est pas seulement « mère de Jésus », ou la « mère de mon Seigneur », elle est la « mère du fils de Dieu ». Gabriel lui dit : « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-haut te couvrira de son ombre (…) C’est pourquoi celui qui va naître sera appelé Fils de Dieu. » On entend derrière les vieux récits de l’Exode, l’histoire de la nuée, qui représente la présence toute-puissante de Dieu au milieu de son peuple et spécialement sur l’arche de l’alliance : L’Esprit couvre Marie de son ombre puisqu’elle est la nouvelle arche.

Ainsi, très vite, les premiers chrétiens nommer Marie sous le nom de la Mère de Dieu. Un papyrus de la fin du 3e siècle a été retrouvé, il est sans doute la première prière connue adressée à Marie : « Sous l’abri de la miséricorde, nous nous réfugions sainte Mère de Dieu. Ne méprise pas nos prières quand nous sommes dans l’épreuve mais de tous les dangers, délivre-nous toujours, Vierge glorieuse, Vierge bienheureuse. Chez les premiers chrétiens, il y a cet instinct très sûr de croire que dans le danger, Marie est spécialement présente : elle sait de son expérience personnelle que Dieu n’a pas peur d’habiter la fragilité humaine (littéralement : Dieu est miséricorde).

Mais au 5e siècle, l’expression « mère de Dieu » commence à faire tiquer. Ainsi Nestorius, évêque de Constantinople, affirme que Marie est seulement mère de l’homme Jésus et ne peut être dit Théotokos, mère de Dieu,  car Dieu n’a pas de mère puisqu’il est l’Origine. Il va donc y avoir (une fois encore) une période de forte tension dans l’Eglise, car derrière ce titre adressé à Marie, c’est la définition de la personne du Christ qui est en jeu. Est-il 100% homme et 100% Dieu ? Si Marie n’est pas mère de Dieu mais seulement mère de l’homme Jésus, alors celui-ci n’est pas vraiment Dieu ! c’est ce que dira en substance le concile d’Ephèse en 431.

Cette fête d’aujourd’hui est très grande puisqu’elle célèbre l’engagement de Dieu dans notre humanité. Le pape François parle de la maternité de Marie en disant que « le cœur du Seigneur, dès les premiers instants, a commencé à palpiter en Marie (…) Le Dieu de la vie a pris d’elle l’oxygène (…) En elle, Dieu s’est lié à notre chair et ne l’a plus jamais laissée. » Nous célébrons Dieu qui a choisi de s’engager bien au-delà de ce que nous pourrions concevoir.

Dernière question : pourquoi en ce premier jour de l’année mettre Marie au centre ? Le pape le redit encore avec son style tellement direct : « Marie n’a jamais de rôle principal et si elle n’indique pas son fils, la dévotion mariale ne sent pas bon car elle ne sent plus le Saint-Esprit. »  Les frères et sœurs protestantes qui sont plus que réservés sur cette question, nous le rappellent à leur manière. Depuis un certain temps, j’ai en mémoire les souvenirs du cardinal Suenens qui dit par une image, quelle place tient la Vierge Marie dans notre foi catholique. Il raconte qu’il était jeune professeur de théologie à l’université de Louvain-la-Neuve il y a de cela fort longtemps. Il était bien dans ses livres et avec ses étudiants mais voici qu’un beau jour virgule le pape le nomme évêque auxiliaire de Bruxelles. Assez décontenancé il reçoit les félicitations des étudiants, de ses collègues. Mais il ajoute ceci : « Ce qui m’a le plus touché durant ces félicitations, c’est qu’un de mes bons amis vienne porter un bouquet de fleurs à ma vieille maman. Ce jour ajoute-t-il, j’ai compris ce qu’est une vraie dévotion mariale : quand on honore Marie de la belle manière, cela fait toujours plaisir à son Fils! » C’est ce que nous faisons aujourd’hui, en ce tout début d’année :  nous honorons Marie pour remercier Jésus,  le Père et le Saint-Esprit, de cheminer en notre humanité, en notre Eglise, avec tant de patience

Nicolas Rousselot sj