Homélie 22 Décembre Lc 1,39-45

Dans les textes que l’Église nous offre en ce quatrième dimanche de l’Avent, presque aux portes de la venue du Seigneur, et surtout dans l’Évangile, la figure de Marie apparaît comme centrale. Face à ces textes, nous pouvons nous demander : qui est Marie ? Que se passe-t-il pour nous lorsqu’elle vient à notre rencontre ? En quoi nous indique-t-elle le mystère de l’amour de Dieu et en même temps la profondeur de la condition humaine ? Je crois que si nous allons vers les textes avec ces questions, nous pouvons en sortir bien guidés et avec plusieurs indices.

Tout d’abord, nous voyons que Marie est d’abord une femme qui sort et qui va au-delà d’elle-même. En effet, on pourrait énumérer le nombre de voyages et de sorties que Marie a entrepris dans sa vie : chez Élisabeth, à Bethléem, en Égypte, auprès de Jésus dans sa vie publique et même sur la croix dans sa passion ; et finalement, auprès de l’Église dans ses premiers pas. Et, en plus, une femme qui sort d’elle-même, mais pas de n’importe quelle manière, sinon avec l’oreille au cœur où résonnent les échos du passage de Dieu dans sa vie. Il est vrai qu’il s’agit d’une sortie vers l’inconnu, vers la nouveauté, ce qui implique beaucoup de courage. Mais dans tout cela, c’est son cœur et les consolations qui viennent de Dieu qui agissent comme une boussole existentielle capable de la guider dans le pas concret, même si elle ne maîtrise pas ou ne connaît pas précisément les contours de ce « où aller ». Elle fait confiance et s’engage dans cette direction parce qu’elle vient de Dieu. Marie dit oui au Oui de Dieu, elle fait alliance et déploie sa libre obéissance fondée sur l’amour.

Deuxièmement, ce qui nous aide à penser l’identité de Marie, c’est sa capacité à se laisser aimer et bénir par l’autre. C’est paradoxal, mais Marie aime en se laissant aimer. En ce qui concerne l’annonciation et la visite de l’ange Gabriel, nous voyons comment elle se laisse saluer, appeler et instruire par Dieu à travers l’ange. Avec Élisabeth, nous voyons comment Marie se laisse accueillir et célébrer par sa cousine. C’est une personne qui se savait aimée et regardée avec bonté dans sa petitesse, appelée, appréciée et significative pour Dieu. Il est facile d’imaginer comment elle a dû se laisser aimer et soigner par Joseph, par Jésus, par l’Église primitive. En tout cas, nous trouvons quelqu’un qui ose faire un pas dans la beauté du se sentir aimé. Et tout cela non pas de manière narcissique, mais comme un don qui l’inspire à se donner activement par amour aux autres, dans des attitudes de service concret, en y mettant son corps, sa patience et son effort.

En dernier lieu, un troisième point concernant l’identité de Marie fait allusion à la manière dont elle déploie sa maternité avant même d’avoir donné naissance à un enfant. Nous sommes en présence d’une femme capable d’accueillir l’autre dans son être, c’est-à-dire de le laisser apparaître, de le laisser parler. Par rapport à Dieu, elle le laisse apparaître dans sa volonté de rédemption : elle le laisse parler, elle laisse Dieu être Dieu, avec sa façon de faire, avec sa façon de parler. Elle ne prescrit pas comment il doit lui parler ou comment il doit s’adresser à elle, mais elle l’accueille avec révérence et le reçoit sans autre forme de procès. Il en va de même pour Élisabeth : elle la laisse parler, elle la laisse aimer selon l’inspiration de l’Esprit. Le silence de Marie, comme le souligne le théologien Bruno Forte, n’est pas une incapacité mais l’hospitalité radicale de l’autre. On pourrait dire la même chose de l’accompagnement de Jésus par Marie, ou de l’accompagnement de l’Église et des croyants individuels par Marie.

Sortir de soise laisser aimeraccueillir l’autre dans son être. Trois qualités qui nous parlent de l’humain, mais aussi de Dieu qui lui aussi sort de lui-même, se laisse aimer et accueille l’autre comme il est.

Je voudrais terminer par une petite anecdote racontée un jour par un jésuite chilien, Cristobal Fones, devant un grand groupe de jeunes.

Ce jésuite faisait une retraite dans un monastère bénédictin, accompagné d’un moine réputé pour sa sagesse, quand, après plusieurs jours de retraite, lors d’un des entretiens d’accompagnement, le moine lui demanda : « Cristóbal, qui es-tu ? Un peu surpris par la question, il se mit à réciter un peu de son curriculum vitae : « Je suis Christobal, jésuite, j’ai obtenu mon diplôme d’avocat avant d’entrer dans la Compagnie, je viens de telle famille et de telle école, je suis né dans telle ville, etc. ». Face à cette réponse, après un silence, le moine a reposé la question : « Cristobal, qui es-tu ? » A la répétition de la question, il s’est senti un peu oppressé, avec la conscience qu’il n’avait pas répondue tout à fait correctement, alors il a commencé à penser à ses idéaux apostoliques, à ce qu’il voulait vraiment faire et être : « Je suis Cristobal, un amoureux de la musique, avec une claire conscience de ce que l’Église doit faire en ce temps, de l’engagement envers les plus pauvres, des changements que nous devons entreprendre par rapport à l’environnement ». Sans dire un mot et après un long silence, le moine lui redemande pour la dernière fois : « Cristobal, qui es-tu ? » Déjà un peu angoissé et comme sans ressources, il comprend qu’il doit revenir à ses expériences originelles d’amour et répond : « Je suis un fils, aimé, désiré par Dieu, soigné par ma mère, mon père et mes frères, regardé, apprécié, aidé dans mes limites et mes péchés ; blessé aussi par le mal dans mon cœur et dans les autres, cherché par Dieu pour l’accompagner dans sa mission, toujours dans le besoin de lui et des autres ». Et après cela les deux sont resté en silence…

Demandons au Seigneur la grâce d’aborder cette fête de la Nativité, guidé et soutenu par la main de Marie qui nous aide à découvrir la profondeur de Dieu dans le Christ et de notre cœur, Amen. 

Ignacio Tomás Puiggari SJ

PRIERE UNIVERSELLE DIMANCHE 22 DECEMBRE

 

(PDT) Seigneur, nous te confions notre monde à la veille de Noël. Nous te le confions avec Marie, Notre sœur et notre Mère

 

Marie,/ vois tous ses habitants de l’île de Mayotte /qui ont perdu des êtres chers /et qui n’ont plus rien.// Marie toi qui est allée au-delà de toi-même/, aide notre pays à aller au-delà de lui-même/, vers ces territoires si éloignés et si pauvres.

 

Marie,/ tu es capable d’accueillir dans ton silence/la présence de l’autre. //La plupart d’entre nous sont empathiques et généreux./Fais Seigneur que/ lors de ces fêtes de Noël,/notre capacité d’amour se fasse encore plus grande, /encore plus inventive, /encore plus spirituelle.

 

Marie/ tu t’es laissée aimer, /tu t’es laissée bénir. /. Apprends-nous, Seigneur/à nous laisser aimer/ bénir, /à la fois par les membres de nos familles, /par nos amis, /mais aussi dans les rencontres inattendues,/ souvent dans des rencontres avec les plus fragiles,/nous t’en prions Seigneur.

 

(PDT) Seigneur, Emmanuel, Dieu avec nous, que Marie nous conduise à toi, cheminant avec nous en cette eucharistie, O Dieu vivant pour les siècles des siècles