Messe « dimanche autrement » 21 mars 2021
Saint Joseph: Ouverture de l’Année de la famille
Jeune 1 – Dis-donc, quelle belle histoire, l’histoire de Joseph ! Tu connaissais tout ça ?
Jeune 2 – Non, franchement, je n’avais jamais écouté de très près les histoires de Joseph. D’ailleurs, est-ce un grand personnage ? Est-ce qu’il compte pour toi, Joseph ? Tu crois qu’il mérite un peu d’attention de notre part ?
P. M. Roland-Gosselin (MRG) – Ah, là-dessus, permettez, je vous arrête tout de suite. L’Église n’a pas attendu cette année pour faire de Joseph un grand personnage, une belle figure de frère aîné. Dans la lettre qu’il publie à son sujet, le pape François nous dit qu’après la Vierge Marie, aucun saint n’a occupé autant de place dans la vie de l’Église. Et il rappelle une vieille formule autrefois répandue : on disait en latin « ite ad Joseph », « Allez trouver Joseph ». Cela faisait référence à l’autre Joseph, celui de la famine en Égypte, quand les gens demandaient du pain à Pharaon et qu’il leur répondait : « Joseph va vous aider » ! Les chrétiens se sont dit : le Joseph de Pharaon, il était intéressant, mais le Joseph de Jésus est plus intéressant encore, et il peut nous aider bien davantage. Pensez… le père de Jésus ! Sûrement, s’il fut un père et un ami pour Jésus, il peut être un père et un ami pour nous.
J1 – Pardon, vous dites qu’il fut un père pour Jésus. Mais si j’ai bien compris l’histoire…
J2 – Oui, si on a bien compris l’histoire, Joseph n’était pas le père de Jésus ; alors pourquoi en faire un père pour nous, ou un modèle pour les pères ?
J1 – Hé ! C’est une question difficile, ça, non ?
MRG – Ah, il est vrai que le cas de Joseph est unique en son genre. Pourquoi ai-je dit qu’il était le père de Jésus ? Parce que c’est Marie qui le dit. Quand elle retrouve Jésus au Temple, elle lui dit : « Ton père et moi, nous te cherchions ». Marie et Joseph, ensemble, sont les parents de Jésus ; ils en assument la mission. Il faut imaginer Joseph à la maison ; un père comme tous les autres, qui enseigne son fils, qui lui apprend même son métier de charpentier. J’imagine la tendresse mutuelle entre Jésus et Joseph. J’imagine leur admiration mutuelle.
Et pourtant, le fond de la vérité, c’est que Marie et Joseph partagent un grand secret. D’une façon unique, ils savent que cet enfant-là est né de Dieu. Ils savent que la vie de cet enfant-là ne plonge pas ses racines seulement dans l’humanité ; cet enfant est trop beau, trop unique, trop précieux pour être né seulement de l’humanité. Cet enfant est un grand mystère.
C’est unique et mystérieux, mais est-ce que ce ne serait pas un peu vrai aussi pour nous tous, et pour tous les parents et les pères ici présents ? J’imagine Joseph qui entend les mots de Jésus : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Jésus marque une distance, et son père entend cela, tous les pères ici présents entendent cela. Et Joseph accepte cela humblement et joyeusement : mon enfant, ta vraie maison est auprès de Dieu. Nous, tes parents, nous te porterons vers la vie, mais ta vie est à Dieu.
Si Joseph dans l’évangile est tellement discret, au point de disparaître du récit, n’est-ce pas pour nous enseigner cela ? La foncière discrétion d’un père, d’une mère ; leur effacement entre les mains de Dieu…
J1 – C’est vrai que Joseph est discret. On ne l’entend même pas parler.
J2 – En revanche, il dort beaucoup ! Et quand il dort, il fait des rêves. Tu les as comptés, les rêves de Joseph, ses « songes » comme on dit ? J’en ai compté quatre !
J1 – Un premier songe pour accueillir Marie qui est enceinte… Un deuxième pour apprendre la menace d’Hérode… Un troisième pour apprendre qu’Hérode est mort et qu’on peut rentrer à la maison… Et un quatrième pour lui dire : « Va donc plutôt à Nazareth, vous y serez mieux… »
MRG – Bien vu ! Déjà le Joseph de Pharaon avait des révélations, et on l’appelait « l’homme aux songes ». C’est une façon biblique de dire que Dieu s’introduit dans la vie d’un homme pour lui parler. Il nous parle comment, Dieu ? À vous, il vous parle en rêve ?
J1 – Je ne sais pas si Dieu me parle souvent… Il me parle peut-être dans ma conscience.
J2 – Ou il nous parle peut-être dans la prière, quand on lit la Bible, quand on contemple Dieu dans son cœur.
J1 – Peut-être qu’il est en train de nous parler, l’air de rien, en même temps qu’on s’amuse avec Joseph…
MRG – Dieu a bien des façons de nous parler. Et si l’on sait peu de choses sur Joseph, nous savons au moins celle-ci : il se laissait conduire par Dieu. Il avait une vie intérieure, Joseph. Il allait conduire sa famille avec un grand soin, une grande attention aux événements, une grande attention à Dieu pour comprendre les événements.
De la même façon que Marie, Joseph est d’abord quelqu’un qui dit « oui » ; oui à la vie qui vient de Dieu ; oui à Dieu qui nous emmène sur des voies inattendues. La première grande grâce de Joseph, c’est d’avoir une telle confiance, une telle foi-confiance pour dire « oui » à Dieu.
La deuxième grâce de Joseph, c’est son courage et sa résolution. Comme nous tous, mais d’une façon violente et douloureuse, Joseph a connu les menaces de l’existence, la brutalité du monde. Comme nous tous, il a dû prendre soin de la vie, se défendre contre les agressions, faire face aux difficultés. Le brave Joseph ferait aujourd’hui un bon saint patron pour beaucoup de parents migrants, ceux qui fuient sur les routes. Et aussi un bon saint patron pour les parents éprouvés, inquiets pour la santé d’un enfant, inquiets pour les épreuves que traverse leur enfant…
Et la troisième grâce de Joseph, vous savez ce que c’était ? Ce fut tout simplement de voir passer les années avec Jésus et Marie, et de voir Jésus grandir, et d’être le premier de tous les pères qui allait grandir à l’école de son enfant. Tous les parents espèrent grandir à l’école de leurs enfants, nous leur souhaitons cela ardemment. Eh bien je crois que ce fut le grand bonheur de Joseph. Et je ne doute pas qu’au terme de sa vie, dont nous ne savons rien, il était le plus heureux des hommes, sûr d’avoir accompli sa vie.
Saint Joseph, discret comme tu l’es, merci de nous donner de belles leçons d’évangiles ; celles d’aujourd’hui, et bien d’autres encore… Amen.
P. M. Roland Gosselin