31 janvier 2021 – Un Esprit Impur
Du banal à l’exceptionnel !
Du banal, parce que Jésus se rend avec ses disciples à la synagogue, le jour de sabbat, comme tout juif pratiquant. Et il enseigne. Là, commence l’exceptionnel…
Les personnes sont frappées par la force et la profondeur de son enseignement. Il n’interprète pas les Écritures comme les scribes, qui sont des experts autorisés ayant étudié dans les meilleurs écoles. Avec Jésus, il y a du neuf, un plus indescriptible, un souffle unique. Ils ont peut-être l’impression qu’il incarne ce qu’il dit. Il enseigne avec autorité.
Puis, coup de théâtre : un homme tourmenté par un esprit impur se manifeste. Il ne lève pas la main pour demander la parole. Non, il crie ! Il est comme hors de lui. Il dit que Jésus est le saint de Dieu et l’accuse d’être venu pour les perdre. Cela semble exact, mais il y a quelque chose de tordu. Ces paroles peuvent semer la confusion parmi les personnes et non les aider à cheminer vers Dieu. Ce raccourci peut conduire à une sortie de route ! Car à l’époque de Jésus, les juifs attendaient un Messie capable de résoudre en un claquement de doigts tout leur problème, capable, par exemple, d’expulser les Romains. Mais Jésus ne correspond pas à cette idée de Messie. Sa personnalité et sa mission se dévoileront progressivement. Seules la Passion et la Résurrection révèleront véritablement qui est Jésus et aussi qui est Dieu.
Revenons à notre récit car un nouvel événement se produit bientôt : Jésus ordonne à l’esprit impur de sortir de l’homme. Et l’esprit quitte l’homme en poussant un grand cri. Cette libération soudaine frappe de nouveau les personnes présentes. D’autres traductions nous disent qu’ils sont terrifiés, effrayés. Ils s’interrogent : qui est Jésus ? Cette question scande, à partir de notre passage, tout l’Évangile de Marc.
Qui est-Jésus ?
Un homme exceptionnel ?
Le prophète dont faisait référence Moïse dans la 1ère lecture ?
Un homme qui a autorité ? Et de quelle autorité s’agit-il ?
Une autorité qui impose sa force ?
Ou une autorité qui libère et élève l’autre ?
Un jeune me disait, cette semaine, qu’il était taraudé, depuis un an, par cette question : « qui est Jésus ? » Alors, il lit des livres d’exégètes : Jésus de José Antonio Pagola et Vie et destin de Jésus-Christ de Daniel Marguerat. Ce sont de très bons ouvrages ! Il a aussi décidé de s’inscrire à un cours au Centre Sèvres. C’est aussi très bon ! Surtout, il porte cette question dans ses prières. C’est essentiel pour celui/celle qui désire mieux connaitre et aimer Jésus, pour lui être plus familier. Et il fait participer ses amis à sa recherche. Sa quête est contagieuse ! Cette soif, cette ouverture à plus grand lui donne de l’élan. Cette question ne le lâche pas. Et il a senti qu’elle était centrale pour lui. Ses tentatives de réponses orienteront probablement sa vie.
Surgira peut-être aussi une question qui engagera encore un peu plus son existence : qu’est-ce que je désire faire avec le Christ, pour le Christ ?
Chers frères, chères sœurs, interrogeons-nous, qui est Jésus pour moi, maintenant ?
A un moment où nous guettent de nouvelles mesures sanitaires plus restrictives et éprouvantes, alors que nous sommes usés par cette pandémie qui perdure, qui est Jésus pour moi ? Ne répondons pas trop vite… Reconnaissons-le, nous sommes encore très sensibles à l’image d’un Dieu très puissant. Cette vision de Dieu reste très ancrée en nous. Un Dieu qui met le monde en ordre, qui impose le bien, qui règle un problème en un instant. Or, toute la vie publique de Jésus va s’opposer à cette illusion. Il a combattu le mal, non pas en entrant dans leur jeu, mais en étant au service et en donnant sa vie par amour.
Laissons Jésus nous instruire et nous guérir.
Laissons-le nous sauver du mal qui est parfois tapis en nous, laissons-le nous sauver d’une possible tristesse et d’un manque de confiance qui peuvent dégénérer en résignation.
Jésus œuvre sans cesse et nous veut vivant.
Lui qui a pu affronter les abymes sans s’y perdre, que souhaite-t-il nous dire aujourd’hui ? Nous pouvons nous laisser porter par cette question pendant ces prochains jours.
Laissons-nous transformer par Lui. Accueillons-Le ensemble, Lui qui se donne dans le sacrement de l’Eucharistie.
Selon la belle formule de saint Augustin, devenons ce que nous recevons.
Claude Philippe, sj