Il vint habiter à Capharnaüm
(Mt 4, 12-23)
Dimanche 22 janvier 2023
Chers frères et sœurs,
Le dimanche dernier la Liturgie de la Parole nous avait présenté la figure de Jean le Baptiste, qui signalait Jésus comme l’Agneau de Dieu.
Aujourd’hui nous sommes invités à contempler le début de l’activité publique de Jésus. L’arrestation de Jean en est le déclencheur. Quelque part Jésus vient continuer l’entreprise du Baptiste, et cela d’autant plus que tous les deux utilisent les mêmes paroles : « Convertissez-vous, le Royaume des cieux est proche. ! »
Mais cette ressemblance pourrait nous tromper. Si nous regardons Jean et Jésus de plus-près, alors les traits distinctifs de l’un et de l’autre se profilent, ils se différencient tout en restant proches dans leurs visés. Les regarder ensemble peut nous aider à voir plus clairement la nouveauté du message de Jésus.
Jean mène sa prédication dans le désert de Judée, au Sud, auprès du Jordan. Jésus va prêcher partout en Galilée, au Nord. Jean reste en un seul lieu, il est statique : les gens viennent vers lui pour l’entendre et pour se faire baptiser.
Jésus parcourt les villages de la région, il va là, où les gens se trouvent, au milieu de leurs activités. Jean est au désert, lieu par excellence de la conversion : aller l’entendre c’est déjà se mettre dans une démarche de pénitence, c’est imiter le peuple d’Israël qui avait été purifié et éprouvé par Dieu pendant quarante ans. Jésus va trouver les personnes au milieu de leur quotidien pour réveiller en eux le désir d’un Royaume qu’eux-mêmes souvent ignorent.
Jean se trouve au Sud, en Judée, là où les savoirs et les pouvoirs se concentrent. Les évangélistes Mathieu et Luc nous racontent comment des pharisiens et des sadducéens, des soldats, des publicains vont pour l’entendre, même pour leur demandent ce qu’il faut faire pour se convertir.
Et bien sûr quelque chose de pareil va se passer avec Jésus, mais ceux que Jésus cherche sont plutôt ceux qui n’ont aucun pouvoir ou savoir, ceux qui sont exclus du système politique ou du système religieux. Le Nord est beaucoup plus riche que le Sud, c’est pourquoi il y a aussi beaucoup plus d’inégalité, voire de pauvreté. Jésus ne prêche pas dans les grandes villes, mais dans les villages où il rencontre des pêcheurs, des paysans, des bergers : des gens qui sont les derniers, qui ne sont pas considérés purs par l’establishment religieux.
Nous savons que Jean avait des disciples, ils sont mentionnés çà et là dans le Nouveau Testament, mais leurs noms ne nous sont pas transmis. Ils sont effacés par la figure énorme de leur maître.
En revanche, nous avons les noms de plusieurs des disciples de Jésus, même dans quelques cas nous avons des portraits qui nous permettent découvrir leur caractère. C’est comme si la lumière de Jésus les mettait davantage en valeur. Depuis le commencement Jésus associa des disciples à sa mission, de manière qu’ils furent appelés à faire les mêmes choses qu’il faisait : annoncer le Royaume, guérir, libérer ceux qui sont sous l’esclavage du diable.
Jésus et Jean utilisent les mêmes paroles, peut-être veulent-ils la même chose, mais leur approche est différente. Jean annonce un Royaume, le Royaume de Dieu, du Dieu guerrier qui vient faire la justice, qui vient purifier le peuple d’Israël.
Jésus annonce et montre un nouveau visage de Dieu, son Père, miséricordieux jusqu’au dernières conséquences, qui va chercher ceux et celles qui sont perdus.
Lorsque Jésus constate comment sa mission commence à échouer, il se comparera à Jean : « Jean est venu, il ne mange ni ne boit, et l’on dit : “Il est possédé par un démon !” Le Fils de l’homme est venu, il mange et boit, et l’on dit : “Voyez cet homme qui ne pense qu’à manger et à boire du vin, qui est ami des collecteurs d’impôts et des pécheurs !” (Mt 11,18-19 ) »
En dépit de leur différence ils vont subir la même destinée : malgré leur succès, malgré les multitudes qui vont vers eux, ils seront rejetés et exécutés.
Aujourd’hui Jésus sort à nouveau à notre rencontre. Il nous cherche là où nous sommes, ils nous montre la miséricorde de son Père. Laissons-nous interpeller et inviter par lui, qui sort aux chemins et nous appelle pour le suivre. Convertissons-nous, changeons de mentalité, mettons nous à la suite du maître itinérant pour chercher les plus petits, les oubliés, pour leur annoncer la présence miséricordieuse de Dieu. Amen.
I. Vazquez sj