La première lecture nous parle de Moïse pendant une bataille avec Amaleq. Cet épisode suit immédiatement celui de Massa et Mériba : le peuple est parti « sur l’ordre de Dieu » pour un endroit où il n’y a pas d’eau. C’est une question de vie ou de mort. Murmures. Moïse avec son bâton frappe le rocher et il en sort de l’eau. A travers Moïse, c’est Dieu qui a tout fait. Dans notre épisode, c’est Josué qui combat, mais l’issue est liée à la prière de Moïse dont les bras fatiguent : il a plus de 80 ans ! On l’assoie sur une pierre, Aaron et Hour lui tiennent les bras étendus.

Ce dimanche nous en sommes à la 99e semaine Missionnaire. Plus que sur le modèle St François Xavier, c’est sainte Thérèse de l’Enfant Jésus qui est aujourd’hui notre référence.

Cela rejoint notre évangile. On a en plus un juge inique, mais notre expérience rejoint celle de la pauvre femme : Dieu nous met dans des épreuves terribles et, nous semble-t-il, ne se presse pas souvent de répondre à nos prières.

Et le discours de l’Evangile est contradictoire. Le même Luc ne nous a-t-il pas dit : « Demandez et on vous donnera, cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira » (Lc 11,9). Bien plus, en Mt 6,7 on lit : « Quand vous priez, ne rabâchez pas comme les païens, qui s’imaginent que c’est à force de paroles qu’ils se feront exaucer (…) Votre Père sait ce dont vous avez besoin avant que vous le lui demandiez. » Marc est encore pire : « Tout ce que vous demandez dans vos prières, croyez que vous l’avez déjà reçu, et vous l’aurez » (Mc 11,24).

La clef nous est donnée par la conclusion : « Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre ? » Mais en attendant… Là comme ailleurs, il est toujours bon de regarder la manière de faire de Jésus. Au moment de ressusciter Lazare, il lève les yeux et dit : « Père, je te rends grâce de ce que tu m’as exaucé. Certes, je savais bien que tu m’exauces toujours, mais j’ai parlé à cause de cette foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé » (Jn 11,41-42).

Un peu plus loin, il confesse : « Maintenant mon âme est troublée, et que dirais-je ? Père, sauve-moi de cette heure ? Mais c’est précisément pour cette heure que je suis venu. Père, glorifie ton nom » (Jn 12,27-28). Jean transpose à cet endroit l’agonie, le combat de Jésus avec l’épreuve que nous raconte les synoptiques : « Non pas ma volonté, mais la tienne » (Mt 16,39).

Luc nous donne la clef de ce comportement : « Si donc vous qui êtes mauvais, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus le Père céleste donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent » (Lc 11,13).

Et si c’était Dieu qui était en prière, nous priait de nous laisser aimer ? Cela me rappelle un sketch de Raymond Devos :

Un jour, je traversais un petit village de Lozère abandonné. En passant devant la vieille église, j’ai vu une lumière. Intense, insoutenable. C’était Dieu, Dieu qui priait.

— Ciel, mais qui Dieu pouvait-Il prier ? m’écriai-je.

— C’est ce que je me suis demandé : qui prie-t-Il ? Il ne se prie pas Lui-même. Non, il priait l’homme.

— L’homme ! nous sommes-nous tous exclamés.

— Mais si, Dieu priait l’homme. Il me priait moi. Il doutait de moi comme j’avais douté de Lui. Il disait : « Oh ! homme, si tu existes, un signe de toi ! » J’ai dit : « Mon Dieu, je suis là. » Il m’a dit : « Miracle ! Une humaine apparition ! » J’ai dit : « Mais, mon Dieu, comment pouvez-Vous douter de l’homme puisque c’est Vous qui l’avez créé ? » Il m’a dit : « Oui, mais il y a si longtemps que je n’en ai pas vu dans mon église, je me demande si ça n’était pas une vue de l’esprit. » J’ai dit : « Vous voilà rassuré, mon Dieu. » Il m’a dit : « Oui, je vais pouvoir leur dire là-haut : « L’homme existe, je l’ai rencontré. » »

Jésus sur la croix prie l’homme de bien vouloir se laisser aimer de cette manière, d’accueillir un Dieu qui risque tout pour susciter un homme libre, un fils.

Lien vers DEVOS – La resurrection de Monsieur Raymond