1er Novembre 2020 – Père Nicolas Rousselot sj

Chers amis,

Notre célébration de Toussaint cette année comporte une certaine gravité. Notre prochaine eucharistie sera dans plusieurs semaines, peut-être dans quelques mois. Une certaine gravité, car chacun, nous avons un choix à faire :

– Soit nous nous laissons abattre par les dernières nouvelles : celles-ci, si tristes qui nous viennent de Nice, ou cette nouvelle redoutée de rentrer comme en hibernation dans un second confinement, ce qui nous fait à tous beaucoup traîner les pieds.

– Soit nous disons au Seigneur, résolument : Seigneur, je veux traverser cette période avec toi. Ou plutôt : Seigneur, fais moi traverser cette période avec toi ! Dès maintenant je te l’offre, en te demandant de t’en servir pour me faire grandir. J’ai appris du précédent confinement ce qu’il fallait faire, ce qui ne fallait pas faire. Je ne lâcherai pas la prière et je te promets de rester unis à mes frères et sœurs, spécialement les plus isolés, les plus petits.

Nous nous rappelons que tous les jours, sauf preuve du contraire, nous aurons le droit de prier dans les églises, de venir dans cette église Saint-Ignace (ou dans une autre, plus proche de notre habitation), au moment de cette heure qui nous est allouée pour prendre l’air. Je pourrai ainsi faire une petite promenade dans le quartier et venir me recueillir. Car il faudra un rythme. L’après-midi, ici à St Ignace, si plusieurs d’entre vous sont partants, il y aura possibilité d’adorer Jésus dans le mystère de son Eucharistie. Comme à l’habitude, il y aura aussi chaque jour des temps d’écoute et de confessions dans des modalités spécialement adaptées. Car il faudra des moments de vraies paroles, qui viennent du fond. Nous vivrons un manque car nous ne pourrons plus célébrer ensemble l’Eucharistie dominicale, ni en semaine ; mais cela ne veut pas dire que nous ne pourrons plus communier. Au prêtre de permanence présent dans l’Église, à n’importe quel moment de la journée, nous pourrons demander la communion au Christ ressuscité, en respectant bien sûr tous les gestes de prudence. Cette communion sera vraiment ce qu’on appelle le « viatique », c’est à dire, le sacrement pour la route.

Il y aura d’autres possibilités que le conseil pastoral annoncera dans les prochaines semaines. Vous regarderez bien le site de l’église Saint Ignace : il y aura régulièrement des petites vidéos spirituelles, pourquoi pas humoristiques, car rire ou sourire fera partie de notre programme spirituel. Il y aura aussi des temps de petits groupes de prière et de partage par zoom avec cette idée que si nous traversons ensemble cette période de confinement, quelque chose se passera, dans l’ordre de l’Esprit. Et quand nous sortirons de ce tunnel, d’ici quelques semaines, d’ici peut être quelques mois, nous serons si heureux de refaire assemblée !

Et viendra ce jour où nous n’aurons plus besoin de masques ou de distances barrière parce qu’un vaccin aura été trouvé. Nous serons alors si heureux de nous prendre les uns les autres dans les bras sans crainte et de déboucher une bonne bouteille et de trinquer ensemble. Il est bon de viser cette perspective, pour nous mettre en route. Patience, ce temps arrivera, et vous verrez, nous réaliserons alors que nous nous serons aidés à nous améliorer les uns les autres car le Christ nous aura transformés.

Qu’est ce qui sera transformé ?

Comme le dit la première béatitude de cet évangile, nous serons devenus davantage des « pauvres de cœur ». Un père jésuite de Lyon m’a dit avoir cherché longtemps ce que voulait dire cette expression vraiment paradoxale de Saint-Mathieu : « être pauvre de cœur », qu’on ne trouve nulle part ailleurs dans les Ecritures. A la fin de sa recherche, il m’a dit : je te fais grâce de tous les articles que j’ai lus. Retiens seulement cette phrase : Dans la Bible, être « pauvre de coeur », c’est ne pas avoir « une mentalité de propriétaire ». Retenons cette expression, car dans un mouvement bien naturel, nous nous approprions les choses, nous nous approprions les personnes, les réalités. Alors que nous avons seulement à les accueillir comme des dons, et non comme des propriétaires. Un jour, nous allons faire chacun, chacune, l’expérience du Grand Passage, que notre cher Père Bernard Paulet a fait dimanche dernier. Bernard, notre nouveau supérieur arrivé début septembre, nous l’avons enterré ce jeudi . Il l’a fait bien tôt, à 63 ans, cette expérience de la Pâque, alors que nous avions encore tant besoin de lui. Oui, un jour, nous nous présenterons devant le Père, si nous avons les « mains vides » (Ste Thérèse de Lisieux), comme des pauvres, nous pourrons alors accueillir le don du Père en plénitude. La grande question de notre itinéraire en ce monde est en fait celle-ci : Est-ce que je vis mes moments de joie, comme mes moments de peine, ou mes moments de grisailles, soit avec des mains qui se referment, soit avec des mains qui s’ouvrent ?

La multitude des saints que nous fêtons aujourd’hui sont si différents les uns les autres. Mais ils ont cela en commun: ils ont vécu jusqu’à leur dernière heure, les mains ouvertes.

Seigneur , apprends nous dans ce confinement, non seulement à garder les mains ouvertes, mais à les ouvrir plus largement encore. Alors nous serons transformés.Amen

Père Nicolas Rousselot sj , chapelain

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« Samedi 24 octobre, famille, amis, et compagnons jésuites sont venus nombreux rendre un hommage au Père Henri Madelin, rendre grâce pour sa vie et le confier au Seigneur. Voici l’homélie donnée par le Père François-Xavier Dumortier, supérieur de la communauté de la rue de Grenelle. «