27 décembre 2020 – Homélie du Père Jean-Bruno Durand
(Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3 ; Ps 104 (105), 1-2, 3-4, 5-6, 8-9 ; He 11, 8.11-12.17-19 ; Lc 2, 22-40)
Aujourd’hui, frères et sœurs, avec cette fête de la Sainte Famille, ce sont trois époques qui se croisent, trois histoires qui se rencontrent.
Il y a l’histoire du peuple de Dieu à travers la Première Alliance, il y a l’histoire de Marie, Joseph et Jésus, et il y a notre propre histoire. Ces trois histoires se rejoignent et s’éclairent mutuellement.
1. L’Ancien Testament et la Première Alliance sont très présents en ce jour. D’abord, la foi d’Abraham et de Sara, l’appel à partir vers un autre pays, la descendance dépassant toute espérance. Puis le Temple, ce lieu par excellence de la présence de Dieu mais aussi de la réponse de l’homme à Dieu. On s’y réfère à la Loi, à la Thora, ce don fait par Dieu pour la vie de son peuple. Surtout, on y découvre toute la force d’une attente et d’un désir. C’est l’attente de la « consolation d’Israël », de l’accomplissement plénier du dessein de Dieu.
Syméon et Anne représentent le meilleur du peuple de Dieu. Un homme juste, religieux, accueillant l’Esprit de Dieu en sa vie. Une femme prophète, vivant dans le jeûne, la prière et le service de Dieu. On peut deviner, on peut sentir leur droiture, leur fidélité, leur foi. Ils ont le cœur ouvert pour ce que Dieu va donner et qui est encore plus grand que tous les dons de la Première Alliance.
2. Jésus est présent. Tout simplement. Avec Marie et Joseph. Prenons le temps de les regarder tranquillement. De jeunes parents, avec leur enfant. Ils vont au Temple pour la purification et ils présentent leur modeste offrande.
Un enfant, dans sa fragilité. Et la joie qu’il apporte. Le Verbe éternel s’est fait petit enfant, le Fils unique du Père se découvre à nous dans la simplicité, dans l’ordinaire d’un nourrisson qui ne parle pas encore.
Et voici que Syméon puis Anne s’approchent. La Première Alliance va vers son accomplissement, elle va vers le Messie promis. Mais c’est sans bruit, pauvrement, humblement. Syméon et Anne ont su deviner, voir et accueillir.
3. En ce jour, nous pouvons nous réjouir. Avec les parents de Jésus. Avec tous les parents qui se réjouissent de l’enfant que Dieu leur a donné. Accueillons déjà cette joie très simple et très belle de l’accueil d’un enfant.
Mais il y a plus encore. La joie et la louange auxquelles nous sommes appelés avec Syméon et Anne, avec Marie et Joseph, sont certes humaines, mais c’est bien plus que cela. C’est par l’Esprit Saint que nous pouvons entrer dans cette joie et cette louange.
Car c’est la consolation d’Israël qui vient, c’est l’accomplissement des promesses, c’est le don plénier de Dieu, la nouvelle et définitive Alliance.
L’attente la plus pure, et sa réalisation… la Première Alliance, et son accomplissement dans le Christ Jésus… eh bien, ils viennent vers nous, ils sont pour nous. L’histoire du peuple de Dieu et l’histoire de Marie, Joseph et Jésus viennent rencontrer notre propre histoire, à chacun de nous. Elles viennent éclairer, transformer notre histoire.
4. « Pour faire un homme, mon Dieu que c’est long » dit la chanson. Eh bien, quand le Verbe se fait chair, quand le Fils de Dieu se fait homme, il prend son temps. Il prend le temps d’apprendre. Il découvre ce que cela veut dire d’être un être humain. Saint Luc nous dit : « Ils retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth. L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui. » (Luc 2,40).
Trente ans d’une vie, voilà la durée de la vie cachée à Nazareth : c’est dire l’importance du temps des préparations. C’est le temps où Jésus découvre de l’intérieur la vie humaine, où il apprend à parler et à marcher. À jouer et à travailler. À aimer et à prier. Comme chaque être humain, il reçoit des siens, de Marie sa mère, de Joseph, de ses cousins et amis, il reçoit et apprend l’humanité. Et, en même temps, il sanctifie cette humanité très simple, très ordinaire, notre humanité à tous, et en particulier la vie familiale. Il nous apprend à vivre et à aimer comme Dieu aime, y compris dans ce qui semble le plus ordinaire et le plus banal.
5. Alors que pouvons-nous demander à Dieu en ce jour ?
Peut-être demander d’être sous la mouvance de l’Esprit Saint, comme Syméon et Anne, pour entrer dans la louange de Dieu, pour annoncer la venue du sauveur.
Peut-être, demander de laisser l’attente se creuser en nous, pour mieux accueillir le don de Dieu. Pour recevoir joie et paix, au plus profond, et dans tout notre être, et jusqu’au passage de ce monde à la vie éternelle. Pour témoigner que la lumière du Christ est donnée à toutes les nations.
Et plus encore, simplement, humblement, demander de prendre l’enfant dans nos bras, comme le vieux Syméon le fait, pour bénir et prier Dieu avec lui.
En cette fête de la Sainte Famille, nous nous réjouissons de cette vie familiale très simple qui fut celle de Jésus, Marie et Joseph, et nous demandons à Dieu que les familles de la terre vivent de cette joie simple et vraie, à la manière de Jésus, à la manière de ses parents, à la manière même de Dieu.
P. JB. Durand, sj